Bonjour. Nous sommes le lundi 18 novembre et voici votre condensé utile d’actualité européenne. Suivez-nous également sur Twitter et LinkedIn.
Le Briefing
L’Allemagne demande à ses ports de refuser les livraisons de gaz russe. La Belgique propose une interdiction des importations au niveau européen. Et la Hongrie milite pour une réévaluation des sanctions pour faire baisser les prix de l’énergie. Sur la question du gaz russe, les Européens marchent en ordre dispersé.
Le terminal flottant de Wilhelmshaven, en Allemagne (c) Commission européenne, 2023
ROBINET COUPÉ • Dernière actualité en date : Gazprom a suspendu ses livraisons de gaz au principal fournisseur autrichien OMV le 16 novembre, sur fond de désaccord sur les prix après une décision arbitrale.
L’Autriche s’approvisionne à 98% auprès de la Russie en gaz. Mais les stocks sont pleins et l’hiver ne devrait pas être un problème. L’UE aborde l’hiver 2024-2025 en meilleure posture qu’il y a deux ans, avec des stocks de gaz remplis à 90 % en novembre 2024.
Pour autant, l’Europe peine à se sevrer totalement du gaz russe.
RAPPELS • Le gaz est livré soit par pipeline soit par des cargos. À la différence du gaz livré par pipeline, le gaz naturel liquéfié (GNL) est d’abord liquéfié pour être transporté par des navires méthaniers. Il faut disposer de terminaux de regazéification pour pouvoir réceptionner le GNL. Il faut aussi disposer de pipelines transfrontalières pour pouvoir l’exporter au sein de l’UE.
Problème(s) : il n’y a pas assez de terminaux de regazéification et de pipelines transfrontalières en Europe, ce qui limite les possibilités d’exportation de GNL au sein de l’UE. Les projets transfrontaliers sont de véritables nids à polémiques, à l’image des négociations très compliquées entre la France et l’Espagne sur la construction de pipelines gazières entre les deux pays.
Le prix du GNL fluctue en fonction de l’offre et la demande mondiale, là où les prix du gaz livré par pipeline sont plus stables. Une augmentation de la part du GNL dans le mix énergétique expose donc l’UE à des variations de prix plus importantes.
SANCTIONS • L’UE a adopté 14 paquets de sanctions contre la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine. En matière énergétique, les sanctions — ou “mesures restrictives” en jargon bruxellois — ont ciblé le charbon et le pétrole, mais pas le gaz (jusqu'à très récemment).
Il aura fallu attendre le 14e paquet de sanctions en juin 2024 pour que l’UE vise les importations de gaz naturel liquéfié (GNL), notamment avec l’interdiction d’utiliser des ports européens pour le transbordement de GNL russe en vue de son exportation vers des pays tiers. Cette mesure s’applique à partir de mars 2025.
Le 14e paquet de sanctions inclut aussi l’interdiction d’importation de GNL russe vers des terminaux de regazéification non connectés au réseau de gazoducs de l’UE, et l’interdiction de tout investissement futur dans des projets de GNL en construction en Russie.
Avec la Pologne qui succède à la Hongrie à la présidence tournante du Conseil de l’UE en janvier, on s’attend à de nouvelles initiatives en matière de sanctions — ce qui pourrait ouvrir la voie à de nouvelles mesures sur le GNL russe.
NOUVEAUX PARTENAIRES • En l’absence de sanctions européennes, la part de la Russie dans les importations européennes de gaz (GNL et pipeline combinés) est passée de 45% en 2021 à 18% en pour les huit premiers mois de 2024, selon le rapport sur l’état de l’union de l’énergie publié en septembre par la Commission.
Pour compenser la baisse importante des importations de gaz russe via pipeline, l’Europe s’est tournée vers la Norvège, qui a fortement augmenté ses exportations, en grande majorité via des pipelines. La Norvège est désormais le premier fournisseur de gaz de l’UE — elle représente 34% des importations européennes (pipeline et GNL confondus) au 1er semestre 2024.
L’Europe s’est également tournée vers le GNL, avec une forte hausse des importations. Les Etats-Unis sont le partenaire clé, avec 48% des importations européennes au 1er semestre 2024.
Les Etats-Unis sont suivis par la Russie, qui fournit à l’Europe 16% de son GNL. Les importations de GNL russe sont en hausse depuis 2022. La France, l’Espagne et la Belgique représentent 87% des importations européennes de GNL russe au 1er semestre 2024. Le gaz qui arrive dans ces pays peut ensuite être exporté vers d’autres pays de l’UE.
Par ailleurs, le contrat qui permet le passage du gaz russe par pipeline via l’Ukraine expire le 31 décembre 2024. Le gaz russe transitant par pipeline représente 5% des importations européennes en 2024, mais l’essentiel des importations de certains pays comme l’Autriche, la Hongrie et la Slovaquie.
TRUMP FACTOR • Donald Trump entend faire passer les Etats-Unis de l’indépendance à la “domination énergétique”, et a fait vœu d’augmenter fortement la production de GNL. Trump entend annuler le moratoire sur la construction de nouvelles infrastructures de GNL décidé sous Biden.
Une hausse de la production américaine pourrait aider l’UE à faire baisser la part de GNL importée de Russie et à rééquilibrer la balance commerciale américaine, sujet de préoccupation majeur pour Trump.
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MERCOSUR • Michel Barnier était à Bruxelles la semaine dernière pour réitérer auprès d’Ursula von der Leyen l’opposition de la France au Mercosur, un accord de libre échange entre l’UE et le Brésil, l’Argentine, le Paraguay, l'Uruguay et la Bolivie.
Les agriculteurs français redoutent particulièrement la concurrence de produits agricoles sud-américains, notamment le bœuf. Le 12 novembre, 622 parlementaires français ont signé une tribune dans Le Monde adressée à Ursula von der Leyen.
La majorité des pays de l’UE soutient l’accord, l’Allemagne et l’Espagne en tête. L’Allemagne y voit un débouché pour ses automobiles. L’accès aux matières critiques telles que le lithium ou le cobalt est un enjeu important pour la transition énergétique européenne.
L’accord doit obtenir une majorité qualifiée au Conseil de l’UE pour être adopté.
META • Amende salée pour Meta. Le 14 novembre, la Commission européenne a infligé une amende de presque 800 millions d’euros à l’entreprise pour avoir abusé de sa position dominante afin de favoriser Facebook Marketplace, le service d’annonce publicitaire en ligne lancé en 2016.
C’est la première amende de Meta pour abus de position dominante. Disposer d’une position dominante sur un marché n’est pas illégal en soi. En revanche, selon la jurisprudence, les entreprises dominantes ont une “responsabilité particulière” de ne pas porter atteinte à la concurrence.
Meta occupe une position dominante sur deux marchés : celui des réseaux sociaux personnels en Europe, et celui des marchés nationaux de l’affichage publicitaire en ligne sur les médias sociaux.
L’infraction de Meta comporte deux volets. L’entreprise est épinglée pour avoir lié Facebook Marketplace à Facebook, donnant automatiquement accès à Facebook Marketplace à tous les utilisateurs de Facebook. Cela confère à Marketplace un avantage que les concurrents ne peuvent égaler.
L’autre infraction de Meta réside dans le fait que l’entreprise aurait offert des conditions commerciales déloyales à d’autres fournisseurs de services d'annonces publicitaires en ligne sur Facebook et Instagram. Ces conditions ont permis à Meta d’utiliser les données générées par ces publicités au profit de Marketplace.
REYNDERS & BELLAMY • L’association des anciens du Collège d’Europe recevait le 14 novembre Didier Reynders et François-Xavier Bellamy pour une conférence à Bruxelles sur l’état de droit et la démocratie en Europe.
Le commissaire sortant à la justice s’est félicité des progrès effectués grâce au rapport annuel de la Commission sur l’état de droit , dont deux tiers des recommandations sont mises en œuvre.
L’eurodéputé PPE François-Xavier Bellamy a souligné que l’état de droit pouvait être menacé tant par l’excès que par le manque de gouvernement et d’autorité. Il s’en est également pris à des juges qui confondent selon lui parfois justice et politique, notamment à la CEDH.
AUDITIONS • Les auditions des commissaires désignés au Parlement se sont achevées le 12 novembre sans accord, en raison de tensions entre groupes politiques autour des six vice-présidents et du hongrois Olivér Várhelyi. Le PPE bloque l’approbation de la socialiste Teresa Ribera, le S&D celles de l’italien Raffaele Fitto et du hongrois Olivér Várhelyi.
Le vote du 14 novembre sur le réglement déforestation n’a pas aidé à calmer le jeu. Le PPE a réussi à faire adopter des amendements affaiblissant le texte grâce au soutien des conservateurs de l’ECR, des Patriots for Europe, et des souverainistes (ESN). Pour le S&D et Renew, cette rupture du cordon sanitaire par le PPE est un casus belli.
Une réunion de la conférence des présidents des commissions est prévue ce mercredi. Le vote final sur l’ensemble du Collège est toujours prévu la semaine prochaine, le 27 novembre. Si un accord n’a pas été trouvé d’ici là, la Commission von der Leyen II risque de voir son entrée en fonction repoussée à janvier 2025.
DÉFENSE • C’est une première. La Commission a approuvé 300 millions de financements européens pour cinq projets d’achat d’armes en commun représentant via l'instrument visant à renforcer l'industrie européenne de la défense au moyen d’acquisitions conjointes (EDIRPA).
Le financement européen s’ajoute à environ 11 milliards d’euros dépensés par une vingtaine d’Etats membres pour l'acquisition conjointe de systèmes de défense aérienne et antimissile, des véhicules blindés modernes, et des munitions. Une partie des achats en commun sera destinée à soutenir l’Ukraine.
Par ailleurs, une clarification des règles d’utilisation des fonds de cohésion européens pourrait donner plus de latitude aux Etats membres pour soutenir leurs industries de défense. Alors que l’administration Trump pourrait sévèrement couper les financements à l’Ukraine, cette “clarification” permettrait à l’UE d’augmenter son soutien financier.
Nos lectures de la semaine
Dans Politico, Eddy Wax explique comment il a “appris à aimer l'euro-anglais”.
Le président d’Airbus Defence & Espace, Michael Schoellhorn, s’est entretenu avec le Financial Times. Lecture vivement recommandée.
Cette édition a été préparée par Léopold Ringuenet, Hana Rajabally, Lidia Bilali, Augustin Bourleaud, et Maxence de La Rochère. À la semaine prochaine !