What's up EU

La newsletter de référence pour comprendre l'UE

image_author_What's up EU_
Par What's up EU
1 mai · 5 mn à lire
Partager cet article :

Von der Leyen en campagne : circulez, rien à voir

Campagne à bas bruit • Mais aussi — Eoliennes, Migration, Sanctions, Ukraine


Bonjour. Nous sommes le 15 avril et voici votre condensé utile d’actualité européenne. Suivez-nous également sur Twitter et LinkedIn


Le Briefing

27 élections nationales et un panier de crabes bruxellois. A deux mois des élections européennes, les partis s’affrontent dans leurs arènes nationales respectives pour influencer la composition du prochain Parlement européen. Parallèlement, Ursula von der Leyen mène une campagne discrète pour tenter d’assurer sa reconduction à la tête de la Commission européenne. 

Ursula von der Leyen à Athènes la semaine dernière © XUrsula von der Leyen à Athènes la semaine dernière © X

GRÈCE • La semaine dernière, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a officiellement lancé sa campagne électorale pour être reconduite à la tête de l’institution.

Elle a choisi de donner le coup d’envoi de sa campagne à Athènes, lors du 50e anniversaire du parti Nouvelle Démocratie (Parti populaire européen, PPE) au pouvoir en Grèce. 

Son discours n’a même pas été annoncé à l’avance aux journalistes. “Apparemment, Ursula von der Leyen a officiellement lancé sa campagne pour un second mandat à Athènes ce week-end. Quelqu’un l’a remarqué ?”, lance Nicholas Vinocur de Politico sur X.

DIESEL • La faible médiatisation du début de cette campagne est loin d’être anodine. Ursula von der Leyen ne semble pas avoir l’ambition de s’engager dans une véritable campagne électorale, et souhaite au contraire rester discrète.

Son investiture par le PPE au congrès de Bucarest début mars a été marquée par un score décevant. Des voix ont manqué à l’unique candidate à l’investiture du PPE, dont celles des Républicains (LR) eux aussi membres du PPE. 

Le commissaire Thierry Breton (proche de Renew) en avait alors profité pour envoyer quelques scuds en direction du 13e étage du Berlaymont — celui de la Présidence de la Commission. Des déclarations qui auraient fortement agacé à l’Elysée, mais pas selon Thierry Breton lui-même qui avance qu'Emmanuel Macron aurait “adoré” ces tweets. 

Autre preuve qu’Ursula von der Leyen s’engage dans une campagne à bas bruit, son équipe de campagne ne comporte pour l’instant que deux individus, par ailleurs nommés très récemment : Björn Seibert, son chef de cabinet à la Commission, ainsi qu’un porte-parole. 

En 2019, la tête de liste PPE Manfred Weber avait été désigné en novembre 2018 et avait pris le temps de réaliser une vaste campagne européenne, se rendant notamment dans tous les Etats membres. Ce dernier avait finalement été écarté de la présidence de la Commission au profit d’Ursula von der Leyen.

RAISONS • La discrète candidate Ursula von der Leyen joue sur deux tableaux. 

D’une part, elle est tête de liste d’un parti dont le succès aux urnes est l’une des conditions de sa reconduction à la tête de la Commission européenne. Le PPE est donné grand gagnant des prochaines élections européennes. 

D’autre part, sa nomination sera d’abord proposée par les chefs d’Etat et de gouvernements réunis au sein du Conseil européen. Von der Leyen doit s’assurer du soutien du plus grand nombre de dirigeants européens, en visant plus large que ses seuls alliés du PPE — citons par exemple le premier ministre espagnol (S&D), le chancelier allemand (S&D) ou encore le président français (Renew). 

Cette campagne sous les radars vise à éviter de s’aliéner des dirigeants, alors même que le PPE arrivera vraisemblablement en tête des urnes à l’issue des élections de juin. 

CASSEROLES • Mais deux dossiers pourraient mettre des bâtons dans les roues de la Présidente de la Commission européenne. 

  • Le Pfizer Gate dans lequel la Présidente de la Commission est accusée d’avoir supprimé des sms échangés avec le PDG de Pfizer concernant les contrats d’approvisionnement en vaccins lors de la pandémie de Covid-19. 

  • Le Pieper Gate dans lequel elle est accusée d’avoir favorisé l’eurodéputé allemand Markus Pieper (CDU, PPE) au poste de représentant de l’UE pour les PME. D’autres candidats mieux qualifiés auraient été écartés au profit d’un allié politique. Plusieurs commissaires — dont Thierry Breton — se sont émus de cette nomination et le Parlement européen tente même de la faire annuler. 

L’impact de ces affaires sur les résultats électoraux est difficile à sonder — vous imaginez une séquence sur le Pfizer Gate en prime time d’un débat télévisé entre les candidats français aux européennes ? Mais ces polémiques pourraient coûter quelques soutiens cruciaux à Von der Leyen parmi les dirigeants qui doivent proposer sa nomination au Parlement européen à l’issue des élections.


Partenariat commercial avec Peugeot

Le nouveau E-3008 : un SUV électrique assemblé en France

Avec son nouveau E-3008, Peugeot affiche son ambition sur le marché européen des voitures électriques — prendre le leadership, mais pas à n’importe quel prix. Ce SUV portera donc les couleurs de la France avec une marque, un design et un assemblage français : 

  • Le Peugeot E-3008 sera produit exclusivement dans l’usine historique de Sochaux en France.

  • Ses batteries 100% françaises sortiront de la gigafactory ACC située dans le Pas-de-Calais. 

  • Son moteur électrique sera fabriqué et produit par la joint-venture STELLANTIS-NIDEC à Trémery (France), et le réducteur sera fabriqué et produit par Stellantis à Valenciennes (France).

  • Même son système Audio sera made in France puisqu’il sera équipé du Focal® Premium Hi-Fi System.


Inter Alia

EOLIENNES • Moins d’une semaine après l’ouverture de deux enquêtes sur des producteurs de panneaux solaires chinois au titre du règlement sur les subventions étrangères (FSR), la Commission s’attaque aux éoliennes.

Le 9 avril, la commissaire à la concurrence Margrethe Vestager a ouvert une enquête sur des producteurs d’éoliennes chinois, également dans le cadre du FSR. Cette enquête visera à déterminer si des entreprises chinoises impliquées dans des projets de parcs éoliens en Europe sont avantagées à outre mesure par des subventions de l’Etat chinois.

“Nous étudions les conditions de développement de parcs éoliens en Espagne, en Grèce, en France, en Roumanie et en Bulgarie”, a déclaré la commissaire, lors d’une intervention à l’université de Princeton. “Nous ne pouvons pas nous permettre de voir ce qui s'est passé avec les panneaux solaires se reproduire avec les véhicules électriques, les éoliennes ou les puces essentielles”, a-t-elle ajouté.

Lors de son discours à Princeton, Margrethe Vestager a aussi déclaré qu’une “approche au cas par cas ne sera pas suffisante”, et qu’il faudra adopter une “approche systématique” sur ces questions. 

En 2013, la Commission avait décidé d’imposer des droits de douane sur les panneaux solaires chinois, mais le commissaire au commerce Karel De Gucht avait dû revenir sur cette décision en raison de l’opposition de l’Allemagne et de la France, en particulier. À l’époque, la Chine avait menacé d’imposer des droits de douanes sur les voitures allemandes, ou encore le vin français, italien et espagnol.

MIGRATION • En séance plénière à Bruxelles le 10 et 11 avril, le Parlement a adopté plusieurs règlements importants, notamment sur la réforme du marché de l’électricité la politique migratoire. 

Après plusieurs années de négociation, le Pacte Asile et Migration a été adopté de justesse par le Parlement européen. Cet ensemble de neuf textes a pour but de réformer le système d’asile de l’UE qui a montré ses fragilités en 2015. 

Ce pacte contient plusieurs mesures comme l’enregistrement des informations des personnes de plus de six ans aux frontières (empreintes et image faciale) dans la base de données commune Eurodac, ainsi qu’un mécanisme de solidarité pour alléger les Etats en situation de “pression migratoire”. 

Concrètement, les Etats membres pourront invoquer une “clause de solidarité” grâce à laquelle les réfugiés pourront être répartis dans plusieurs Etats membres — si un Etat membre refuse, il devra à la place apporter un soutien financier.

Pourtant, le pacte semble ne satisfaire personne. Cela tient notamment à l’interdépendance des dossiers : si l’un des textes ne passait pas, l’ensemble du pacte aurait été rejeté. Une partie des eurodéputés souhaitait également parachever ce pacte avant l’élection du nouveau Parlement, où l’extrême-droite aurait pu proposer un pacte plus dur. 

Cet argument n’a pas convaincu les Verts, le groupe de la Gauche ainsi qu’une partie des sociaux-démocrates, qui pointent les risques que le Pacte ferait peser sur les droits humains.

Le Pacte devrait être adopté par le Conseil le 29 avril (vote à la majorité qualifiée). La Pologne et la Hongrie comptent voter contre car ils sont opposés au mécanisme de solidarité. S’il est adopté, le Pacte entrera en vigueur en 2026.

SANCTIONS • Le Tribunal de l’UE a annulé, le 10 avril, l’inscription des oligarques Piotr Aven et Mikhaïl Fridman sur les listes des personnes visées par des mesures restrictives mises en place par le Conseil européen dans sa politique de sanctions en réponse à l’invasion russe de l’Ukraine.

Le 28 février 2022, le Conseil avait justifié leur inclusion sur ces listes au motif qu’ils avaient “apporté un soutien matériel ou financier” au gouvernement russe dans le déclenchement de la guerre avec l’Ukraine du fait de leur rôle à la tête du groupe financier et industriel privé russe Alfa Group. 

L’annulation est fondée sur un manque de preuves, le Tribunal ayant considéré que “bien que les motifs allégués par le Conseil puissent être de nature à établir, le cas échéant, une forme de proximité [des deux hommes] avec M. Poutine ou son entourage, ils ne permettent pas de démontrer” que ceux-ci ont soutenu les “décideurs russes responsables de l’annexion de la Crimée ou de la déstabilisation de l’Ukraine”, ni qu’ils ont tiré avantage du conflit.

Le jugement ne porte que sur les motivations justifiant les sanctions contre Piotr Aven and Mikhaïl Fridman entre février 2022 et mars 2023. Ils restent donc soumis aux mesures de restriction communautaires, du moins jusqu’à l’aboutissement des procédures judiciaires en cours contre les décisions du Conseil de septembre 2023 et mars 2024 reconduisant ces sanctions.

La levée des sanctions nécessite par ailleurs une décision unanime des 27, ce qui n’a rien d’évident au vu du coût politique élevé d’une telle décision pour certains gouvernements des Etats membres. L’UE ayant placé 1706 personnes et 419 entités russes sous sanctions, la décision du 10 avril pourrait constituer un précédent pour d'autres recours.  

UKRAINE Après les hésitations des Etats membres sur les détails de la prolongation des mesures de libéralisation du commerce de produits agricoles avec l’Ukraine, le Parlement et le Conseil ont trouvé un accord sur le sujet. 


Nos lectures de la semaine

  • Dans une interview pour le FT, Enrico Letta, chargé par la Commission de réaliser un rapport sur la compétitivité européenne, fait part de ses premières observations sur le sujet.

  • Pour le Guardian, Fred Harter a rencontré les producteurs de café éthiopiens qui se disent menacés par la Regulation on Deforestation-free Products.

  • Dans Transitions, Aleksander Kaczorowski interviewe Michael Ignatieff, ancien recteur de Central European University.

  • Dans une note pour le CER, Iain Begg discute de la nécessité de réformer le budget de l'UE.


Cette édition a été préparée par l’équipe de What’s up EU, notamment Luna Ricci, Gianni Gaboret et Maxence de La Rochère. À la semaine prochaine !