Bonjour. Nous sommes le 25 novembre et voici votre condensé utile d’actualité européenne. Suivez-nous également sur Twitter et LinkedIn.
Le Briefing
“The most beautiful word in the dictionary is tariff. It's my favorite word.”
C’est en ces termes que le Président élu Donald Trump a annoncé la couleur. L’UE et son important excédent commercial sont dans le viseur américain.
CONTEXTE • Alors que la France se mobilise pour constituer une minorité de blocage contre le Mercosur, l’UE s’apprête à vivre un choc tarifaire inédit avec les Etats-Unis. Si vous avez raté le train sur le Mercosur, on renvoie à cet excellent article de nos amis de BLOCS.
Les querelles douanières transatlantiques ne sont chose nouvelle. L’affrontement croisé sur le sujet des aides publiques versées à Boeing et son concurrent européen Airbus a commencé en 2004.
Sous Trump I, l’UE a également été directement touchée, avec des droits de douane additionnels de 25% sur l’acier et de 10% l’aluminium à partir de 2018. L’UE avait répliqué en moins de trois semaines, en augmentant les taxes douanières sur plusieurs produits américains tels que les motos Harley-Davidson (passage de 6% à 31%).
Avec des moyens légèrement différents, le cap a été maintenu sous la présidence Biden à partir de 2020 : maintien des droits de douane sur les importations chinoises, subventions massives à la transition énergétique avec l’Inflation Reduction Act et ses clauses de contenu local (“Buy American”).
L’administration démocrate a cependant ouvert la voie à un réchauffement des relations commerciales avec l’UE, avec la mise en place en 2021 du Conseil Commerce et Technologie (Trade & Technology Council) pour renouer un dialogue amical, et l’accord conclu la même année pour lever temporairement les droits de douane sur l’acier et l’aluminium.
BALANCE TON DÉFICIT • Les Etats Unis sont le premier marché à l’exportation pour les pays de l’UE, qui a enregistré un excédent commercial de 158 milliards d'euros avec les USA en 2023. Il atteindra probablement un record en 2024 avec 230 milliards d’euros d’excédent.
Sans surprise, c’est l’Allemagne qui compte l’excédent commercial le plus important avec €85,8 milliards en 2023, suivi par l’Italie (€42 milliards) et à l’Irlande (€31 milliards). L’excédent commercial français vis-à-vis des Etats-Unis s’établit à €235 millions.
D’un point de vue sectoriel, l’excédent commercial européen pour les machines-outils et les véhicules automobiles représente €102 milliards en 2023, l’écart s’étant fortement creusé depuis 2020 (il était à €55 milliards). L’UE est un importateur net d’énergie vis-à-vis des Etats-Unis, avec un déficit commercial de €69,5 milliards, l’écart s’étant fortement creusé depuis 2020 (il était à €13,1 milliards).
Donald Trump entend rééquilibrer la balance commerciale américaine en augmentant à nouveau tous azimut les droits de douane. Donald Trump a promis d’augmenter les droits de douane de 10% à 20% pour toutes les importations et de 60% pour la Chine.
D’après le CEPII, les exportations chinoises vers les USA chuteraient de 80,5% et se dirigeraient en masse vers l’UE (où les droits de douane sont moins élevés) suite à l’augmentation des droits de douane promise par Trump.
RETORSION, MODE D’EMPLOI • L’UE dispose d’instruments pour amener Trump à la table des négociations.
Représailles tarifaires. En 2018, l’UE avait riposté rapidement face aux mesures protectionnistes américaines. Elle avait alors augmenté les droits de douane sur des produits américains symboliques, tels que les motos Harley-Davidson, les briquets Zippo ou encore les jeans Levi’s. L’UE peut imposer des tarifs douaniers en cas de dumping (règlement 2016/1036) ou en cas de subventions étrangères (règlement 2016/1037).
L’instrument anti-coercition (ACI). Adopté définitivement en 2023, l’outil anti-coercition dote l’UE de moyens de dissuasion commerciale pour décourager la coercition économique. Il peut être utilisé pour lancer des contre-mesures contre un pays tiers en dernier recours.
Le règlement sur les subventions étrangères (FSR). Adopté en 2022, le FSR permet de corriger les distorsions de concurrence induites par les subventions accordées par des pays tiers lors de la passation de marchés publics ou d’opérations de M&A en Europe. Les Etats-Unis n’ont pas encore été visés par le FSR.
POLITIQUE • Alors que le rapport Draghi a dressé le constat d’une économie européenne en décrochage, la baisse des exportations vers les USA et la réorientation des excédents commerciaux de la Chine vers le marché européen nuiraient significativement à la compétitivité de l’industrie européenne.
A l’image de la promesse récente d’Ursula von der Leyen d’acheter davantage de gaz naturel liquéfié (GNL) américain, les premiers signaux européens face à l’élection de Donald Trump signalent une volonté d’apaisement. Les leaders européens tablent sur des négociations avec le nouveau Président américain pour conclure des accords préférentiels pour l’UE, plutôt que de s’engager dans un bras-de-fer commercial.
La réponse européenne face à la politique protectionniste américaine dépendra in fine de son unité. L’imposition en octobre 2024 de droits de douane additionnels à l’importation de véhicules électriques chinois a déjà mis en évidence la tendance de certains gouvernements européens à jouer leur propre partition devant le risque de mesures de rétorsion commerciales.
Partenariat commercial avec Enky
Enky, startup belge innovante, propose un service de Furniture as a Service (FaaS) : du mobilier de haute qualité, neuf ou reconditionné, disponible par abonnement pour les entreprises (bureaux, hôtellerie, immobilier locatif). Elle compte comme clients des entreprises telles que Natixis, Payplug, le groupe BPCE ou encore Kymono.
Depuis sa création Enky a placé plus de €5M de mobilier durable sur le marché et réunit une communauté d’investisseurs ayant déjà financé plus d’€1M en quelques mois.
Aujourd’hui, Enky va plus loin en ouvrant son capital pour accélérer sa transition vers le mobilier reconditionné, un marché en plein essor qui croît 3 fois plus vite que celui du neuf.
Enky vous donne l’opportunité unique de participer au capital à partir de 1 000 €.
Sa vision : faire du mobilier reconditionné une norme, avec un impact positif sur la planète et une expérience client exceptionnelle.
Ses projets : ouvrir deux ateliers de reconditionnement à Paris et Londres d’ici 2025 et accélérer sa croissance.
La campagne de crowdfunding est disponible sur leur propre plateforme d’investissement Enky Invest, 324 000€ ont déjà été levés en quelques jours.
* Ceci n’est pas un conseil en investissement. L’investissement comporte un risque de perte en capital.
Inter Alia
FUMÉE BLANCHE • Après plus d’une semaine de blocage, les groupes politiques PPE, S&D, et Renew sont parvenus à un accord. Cet accord in extremis ouvre la voie à l’élection du prochain collège des commissaires lors de la prochaine plénière du Parlement européen à Strasbourg le 27 novembre. La nouvelle Commission devrait entrer en fonction le 1er décembre.
Les dirigeants des groupes PPE, S&D et Renew ont confirmé leur soutien à la nomination des sept commissaires sur lesquels ils devaient encore se prononcer, après les auditions non concluantes des candidats devant le Parlement.
Cet accord est le fruit de douloureuses concessions. Le PPE a accepté de voter en faveur de Teresa Ribera (S&D), actuelle ministre espagnole de l’environnement critiquée pour sa gestion des inondations dans la province de Valence, au poste de commissaire à la concurrence et de vice-présidente exécutive de la Commission pour une transition propre, juste et compétitive.
En contrepartie, les socialistes ont abandonné leurs vétos contre les candidats commissaires d’extrême droite Raffaele Fitto (CRE) et Olivér Várhelyi (Patriotes). S’ils ont fini par accepter la candidature de l’Italien au poste de vice-président exécutif de la Commission chargé de la cohésion et des réformes, les socialistes ont obtenu une réduction du portefeuille du futur commissaire à la santé hongrois, qui sera déchargé de ses responsabilités en matière de droits de santé sexuelle et reproductive, et de gestion des crises sanitaires au profit de la commissaire désignée belge, Hadja Lahbib (Renew).
Malgré la signature de la d’un manifeste (“platform cooperation statement”) avec Renew et le S&D, le PPE a déclaré se réserver la possibilité de travailler avec les Patriotes pour l’Europe et les Conservateurs et réformistes européens (CRE), notamment pour revenir sur des textes du Green New Deal.
TECHNOLOGIE • L’UE souhaiterait conditionner l’obtention de subventions européennes à des transferts de technologies dans le cadre d’un appel à projet sur les batteries électriques, selon les informations du FT.
Si l’appel à projet en question n’est pas cité dans l’article, il pourrait vraisemblablement s’agir de l’appel à projets sur les batteries du Innovation Fund (IF24 Battery), qui doit flécher €1 milliard vers des projets de fabrication de batteries électriques innovantes.
Les entreprises de batteries chinoises se verraient contraintes de disposer de lignes de production européennes et d’accords de transferts de technologie pour bénéficier de ces subventions.
Certains économistes se sont manifestés pour rappeler que si ces mesures rappellent des procédés chinois commandant l’accès à leur marché, le rattrapage technologique de la Chine s’explique davantage par sa politique industrielle active que par les transferts de technologies obligatoires.
Concordance temporelle fortuite, ces déclarations interviennent quelques jours avant que la DG COMP – autorité de la concurrence européenne – publie sa proposition de révision des règles d’appréciation des accords de transferts de technologie.
BCE • La Banque centrale européenne (BCE) a publié son rapport semestriel sur la stabilité financière le 20 novembre. Malgré une inflation qui converge vers l’objectif de 2%, la BCE s’alarme des “niveaux élevés de dette et les déficits budgétaires importants, conjugués à un faible potentiel de croissance à long terme et à une incertitude relative à la politique économique, augmentent le risque que les dérapages budgétaires ravivent les inquiétudes des marchés quant à la soutenabilité de la dette souveraine.”
Nos lectures de la semaine
Henry Foy du FT déjeune avec António Costa, le nouveau président du Conseil européen.
Matthias Bauer de l'ECIPE critique « l'obsession de l'Europe pour la bureaucratie ».
Jean Boghossian partage avec le FT ses adresses préférées à Bruxelles pour déjeuner, boire, faire les boutiques, se loger et découvrir le patrimoine artistique de la ville.
Cette édition a été préparée par Nathan Munch, Augustin Bourleaud, Luna Ricci, Antoine Ognibene, Edgar Carpentier-Charléty et Maxence de La Rochère. À la semaine prochaine !