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Par What's up EU
15 janv. · 5 mn à lire
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Départ de Stéphane Séjourné et élections européennes

Mais aussi — OpenAI et Microsoft, Défense et Trump


Bonjour ! Nous sommes le 15 Janvier 2024 et voici votre condensé utile d’actualité européenne. Suivez-nous également sur Twitter et LinkedIn


Le Briefing

Le 11 janvier, le député européen Stéphane Séjourné a été nommé Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères par Emmanuel Macron dans le cadre d’un remaniement ministériel. 

Jusqu’à présent, Stéphane Séjourné était pressenti comme la future tête de liste de Renaissance pour les élections européennes. Son départ à quelques mois à peine des élections laisse cette place vacante, alors que les libéraux européens sont affaiblis dans les sondages.

Stéphane Séjourné © Parlement européenStéphane Séjourné © Parlement européen

DÉPART • Il y a quelques semaines à peine, Stéphane Séjourné se disait encore prêt à être la figure de proue de Renaissance pour les élections européennes de juin 2024. “J’ai envie de mener la bataille”, déclarait le député européen, aussi secrétaire général du parti Renaissance, dans une interview avec Politico fin novembre 2023.

Sa nomination en tant que Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères change la donne. Renaissance devra trouver une nouvelle personnalité pour mener sa liste en vue des européennes — personnalité qui devra également convenir au MoDem et à Horizons.

Si plusieurs noms circulent — comme Clément Beaune, Olivier Véran ou encore Pascal Canfin — il est peu probable qu’une annonce soit faite avant que l’ensemble du gouvernement soit dévoilé (notamment l’identité des secrétaires d’Etat et d’une partie des ministres délégués).

RENEW • Stéphane Séjourné quitte le navire à un moment crucial. Les sondages sur les intentions de vote aux européennes indiquent que Renew Europe (libéraux), le groupe politique auquel Renaissance appartient — et qui est présidé par Stéphane Séjourné — pourrait perdre une vingtaine de sièges au Parlement européen.

Actuellement troisième force politique au Parlement européen derrière le Parti populaire européen (PPE, groupe de centre-droit) et les sociaux-démocrates (S&D, groupe de centre-gauche), Renew risque d’être dépassé par le groupe d’extrême droite Identité et démocratie (ID) dont le Rassemblement national fait partie. 

Les différents sondages suggèrent qu’ID pourrait faire une poussée significative lors des élections et gagner une vingtaine de sièges au Parlement européen.

EQUILIBRES • Quelques jours avant sa nomination, Stéphane Séjourné a d’ailleurs fait part aux journalistes de ses inquiétudes à ce sujet. “Nous avons une responsabilité collective pour convaincre les citoyens qu'il existe d'autres alternatives aux extrêmes”, a-t-il déclaré début janvier.

Le Président de Renew craint en effet qu’une montée de l’extrême droite vienne perturber les équilibres politiques au sein du Parlement européen. 

Depuis 2019, la “grande coalition” entre le PPE, S&D et Renew est au centre de l’activité institutionnelle parlementaire européenne. Cette coalition n’est pas figée : “au lieu d’une coalition s’imposant pendant l’ensemble de la législature, on observe des coalitions variées sur différents sujets”, résument les auteurs d’un rapport du Groupe d’études européennes.

Pour autant, cette alliance a défini la majeure partie de l’activité parlementaire européenne des cinq dernières années. Si elle devrait rester majoritaire lors des prochaines élections, elle pourrait se voir affaiblie. Ces derniers mois, elle s’est par ailleurs déchirée sur des textes à forte ambition environnementale, sur lesquels le PPE a trouvé du soutien auprès du CRE (les Conservateurs et réformistes, groupe de droite avec des factions de centre droit et d’extrême droite) et ID.

La montée de l’extrême droite pourrait s’accompagner d’un transfert du centre de gravité du Parlement vers la droite et ainsi faire perdre aux libéraux de Renew le rôle de médiateur au centre de l’échiquier politique européen. Dans ce scénario, l'influence du PPE serait renforcée. 

FRANCE • Du côté de la France, un sondage Elabe du 13 janvier donne le RN grand vainqueur de ces élections avec 28.5% des intentions de vote. 

Selon le même sondage, Renaissance recueille 18% des voix. Le PS, Europe Ecologie les Verts, la France insoumise et LR sont au coude-à-coude entre 7.5% et 9.5% des intentions de vote.

Renaissance devra trouver sa tête de liste dans de brefs délais car la campagne commencera plus tôt qu’en 2019. Jordan Bardella a d’ores et déjà annoncé qu’il tiendra son premier meeting de campagne en tant que tête de liste du RN le 3 mars à Marseille. Renaissance devrait tenir son premier meeting à la même date.

PERSPECTIVES • En tant que Président de Renew, Stéphane Séjourné a été un moyen pour Emmanuel Macron de renforcer son influence au sein du Parlement européen.

Il pourrait manquer à Renew dans l’après-élection, période pendant laquelle des négociations entre les différents groupes politiques ont lieu afin d’attribuer plusieurs rôles clés : les présidents des différentes commissions parlementaires, le Président de la Commission européenne (qui doit être approuvé par le Parlement) ou encore les différents commissaires européens (également soumis à un vote du Parlement).

Son absence “créera un vide au sein de Renew", explique le responsable d’un autre groupe politique à Politico. "Séjourné aurait été extrêmement important après les élections. À présent, il a quitté le navire”, ajoute-t-il.


Partenariat commercial avec Interbev

Cette semaine, nous vous proposons de découvrir un article de l’achéozoologue Joséphine Lesur sur la domestication des animaux. 

L’archéozoologie est la science qui étudie les relations entre humains et animaux dans le passé à travers des vestiges archéologiques — “en clair, on étudie les restes de très très vieilles poubelles qui nous racontent des histoires”, note Joséphine Lesur. La scientifique remonte jusqu’au loup, première espèce à avoir été domestiquée il y a environ 15 000 ans — et qui donnera le chien — pour ensuite retracer la naissance des pratiques d’élevage et la manière dont elles ont structuré les sociétés humaines. 

Le travail de l’archéozoologue permet de mieux comprendre la manière dont l’élevage a influencé l’évolution de différentes espèces, y compris aussi la nôtre. Si vous voulez découvrir le travail passionnant de Joséphine Lesur, rendez-vous sur le média Agriculture-circulaire.


Inter alia

CONCURRENCE • Le 9 janvier, la Commission européenne a annoncé qu’elle allait examiner la nature du partenariat entre la multinationale Microsoft et la société OpenAI (qui a développé ChatGPT) afin de déterminer si cette relation devrait faire l’objet d’une enquête au regard du règlement de l’UE relatif au contrôle des concentrations. 

Plusieurs éléments pourraient conduire la Commission à considérer que ce partenariat s’apparente à une fusion : entre autres, l’investissement de Microsoft de 13 milliards de dollars dans OpenAI, son statut de fournisseur exclusif des services cloud d’OpenAI, ses droits à une part plafonnée des bénéfices d’OpenAI et sa place d’observateur au sein du conseil d’administration d’OpenAI (place obtenue après le retour de Sam Altman dans la start-up à la suite d’un passage éclair chez Microsoft en novembre 2023).

Le même jour, la Commission a également lancé deux appels à contribution et demandes d’information sur l’état de la concurrence dans le secteur des mondes virtuels et de l’IA générative. Elle souhaite examiner plus largement la nature et l’impact sur le marché de certains accords conclus entre les grands acteurs du marché numérique et les fournisseurs d’IA générative, afin d’évaluer le risque de capture des innovations par un petit nombre d’entreprises dominantes. 

Elle a également appelé les parties prenantes à donner leur avis sur la manière dont le droit de la concurrence de l’UE devrait s’adapter afin de maintenir la compétitivité au sein des marchés des mondes virtuels et de l’IA générative. 

Ces annonces interviennent un mois après que l’autorité britannique de la concurrence et des marchés (CMA) a lancé un appel à contributions sur le partenariat entre Microsoft et OpenAI.

DÉFENSE • Le commissaire européen au marché intérieur (également chargé de la défense), Thierry Breton, a déclaré le 9 janvier vouloir créer un ambitieux fonds de défense européen de 100 milliards d’euros afin d’augmenter “significativement” la “base industrielle de défense européenne”

Cette proposition précède la présentation fin février par la Commission d’une nouvelle stratégie industrie de défense européenne (EDIS) et d’un nouveau fonds (EDIP) visant à renforcer la capacité de production et d’acquisition d’armes à plusieurs pays sur le continent, tout en encourageant la coopération transfrontalière. 

Actuellement, les États membres n’investissent pas assez dans leurs industries de défense et leurs armées par rapport à leur engagement en tant que membres de l’OTAN (seulement 1,5% du PIB contre les 2% requis, selon l’Agence de défense européenne en 2022). 

Les doutes qui persistent sur la capacité de l’UE à remplir son objectif de fournir 1 million d’obus à l’Ukraine d’ici le printemps illustrent les faiblesses de l’industrie de défense européenne.

Thierry Breton devra toutefois convaincre de la pertinence d’un tel fonds et de son montant ambitieux face aux États membres lors du Conseil européen extraordinaire du 1er février 2024 — pendant lequel les dirigeants européens tenteront à nouveau de s’accorder sur 50 milliards d’euros additionnels d’aide à l’Ukraine.

TRUMP • La possibilité du retour de Donald Trump à la Maison blanche suscite de nombreuses inquiétudes à Bruxelles. Lors d’un entretien sur France 2 le 11 janvier, Christine Lagarde a alerté sur la menace que représente cet éventuel retour.  

“Si on doit tirer les leçons de l’histoire — c’est-à-dire de la façon dont il a mené les quatre années de son mandat — il est évidemment une menace”, a avancé la présidente de la Banque centrale européenne.

Le 9 janvier, durant un événement au Parlement européen, Thierry Breton a dévoilé les mots qui auraient été ceux de Donald Trump lors d’une réunion durant le Forum économique mondial à Davos en 2020. 

“Vous devez comprendre que si l'Europe est attaquée, nous ne viendrons jamais vous aider et vous soutenir. (...) L’OTAN est mort, nous allons quitter l’OTAN” aurait déclaré l’ancien Président des Etats-Unis à la présidente de la Commission européenne durant cette rencontre.

Au-delà de la crainte d’un affaiblissement de l’OTAN dans l’hypothèse d’un départ des Etats-Unis, c’est également l’incertitude quant à la volonté de Donald Trump d’apporter un soutien à l’Ukraine qui inquiète Bruxelles. Ce dernier oscille entre des promesses de “leur donner plus que ce qu’ils n’ont jamais eu” et des menaces de supprimer les aides à Kiev. 

L’Union européenne a donc un peu plus d’un an pour mettre en place des pare-feux et tenter de se préparer à une réélection à la probabilité non-négligeable.


Nos lectures de la semaine

  • Pour l’Institut Montaigne, Bernard Chappedelaine revient sur la réforme du système d'asile et de migration de l'UE et sur l’importance du sujet pour les électorats européens. 

  • Dans Transitions, Martin Ehl met en évidence ce qu’il considère être les ressorts opportunistes de la politique étrangère des capitales d’Europe centrale.


Erratum : dans notre édition du 9 janvier, nous avons écrit que Northvolt était une entreprise suisse. C’est une erreur ! Ce champion européen de l’industrie des batteries électriques est bien évidemment suédois.


Cette édition a été préparée par Augustin Bourleaud, Guillaume Renée, Luna Ricci, Lucie Ronchewski et Maxence de La Rochère. À la semaine prochaine !

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